Année de diffusion : 2015
Descriptif du documentaire :
L’histoire de Svetlana Allilouïeva, fille de Joseph Staline, s’avère digne d’une tragédie grecque. Celle qu’on surnommait « la petite princesse du Kremlin » est devenue le symbole de la dissidence au régime, en passant à l’Ouest en 1 967. Elle vivra vingt-cinq ans aux Etats-Unis, avant de mourir en 2011 dans une quasi-indigence… En déroulant le parcours de cette fille maudite, Jobst Knigge dévoile le versant intime de la dictature soviétique.
L’intéressée n’apparaissant qu’au détour de brèves vidéos, de photos et d’extraits de lettres, sa psyché profonde nous reste inaccessible. Mais les témoignages de premier plan (sa biographe, son neveu, la petite-fille de Gorki, le fils de Nikita Khrouchtchev…) restituent, de manière très incarnée, ses différentes facettes : la jeune fille élevée dans la terreur, dont l’entourage a été peu à peu décimé par la folie stalinienne. La femme obligée de payer très cher sa liberté — rompant avec ses enfants restés à l’Est, terminant sa vie en apatride. La grande amoureuse, qui a souvent fait les mauvais choix.
En creux, le film esquisse un portrait très personnel du « petit père des peuples », capable de lettres affectueuses comme de gestes de cruauté extrême. La relation viscérale qu’entretiendra jusqu’au bout Svetlana à son père apparaît au détour d’une séquence, dans laquelle, alors âgée, elle s’énerve qu’on lui parle encore de Staline. On la voit trépigner, marteler le vide de ses poings, comme une vieille petite fille à bout. Instantané saisissant d’une héritière damnée, qui n’aura jamais réussi à s’affranchir de ce legs trop lourd. — Hélène Marzolf